"J'ai pensé si souvent..." (Texte)

J'AI PENSE SI SOUVENT....

"Un beau jour d'octobre,
alors que le ciel rougeoyait à l'horizon
et que la vie s'éveillait tout autour...

Depuis les poules, qui lissaient leur robe
jusqu'à mes maîtres, là-bas, dans la maison
en ce jour nouveau, la vie reprenait son cours.

Ma vie et celle de mes sœurs
n'avait jamais rien eu de formidable
enchaînées de l'aube au crépuscule
privées de contacts, de chaleur
nous avions quand même ce souhait inaltérable
que demain serait un mieux, même minuscule.

J'ai repensé si souvent
à mes enfants que vous m'avez arrachés
Je les ai revus partir
m'appelant de leurs cris désespérés

J'ai repensé si souvent
à ces heures passées à les chercher
me demandant pourquoi ?
et ce qui pouvait leur arriver

J'ai repensé si souvent
joignant mes larmes aux autres
quel sort cruel s'acharnait
sur moi et mes semblables.

J'ai repensé si souvent
à ces machines que vous nous branchiez
nous soulageant d'une douleur physique
mais qui triplait notre douleur morale.

J'ai repensé à tout cela tant de temps
quand ce matin arrivèrent vos camions.
ce voyage, ces images, ces odeurs..
je n'aurai jamais crû que le monde était si grand...
ce soleil qui nous chauffait, ces enfants qui me rappelaient tant les miens.
cette nature si grande et si belle
cette liberté à perte de vue...

Tout cela pour arriver dans ce lieu..

Ce lieu de souffrance, de terreur et de mort..

Ce lieu où nous nous serrons les unes contre les autres.
N'ayant que trop compris ce qui nous attend.
car même si nous ne sommes que "bêtes"
nous n'en sommes pas moins dénuées de réflexion..

J'ai repensé si souvent...

Quand on me souleva par une patte
avant qu'on ne me coupa la gorge
J'ai repensé à vous, mes enfants
souhaitant que vous connaissiez un meilleur sort.

J'ai repensé si souvent.

ET j'ai compris !

J'ai compris que la lâcheté, la tromperie,
mais surtout la traîtrise faisait partie de votre monde...


Un beau jour d'octobre,
alors que le ciel rougeoyait à l'horizon
et que la vie s'endormait tout autour...
j'ai fermé les yeux sur ce monde pourri."